III-17 (18/07/2004) : Logicieloplégie


Le bug de la SNCF qui a eu lieu jeudi dernier, vous en avez sûrement entendu parler. Juste quelques jours avant la période la plus noire de monde dans les gares, le système de réservation de billets de notre chère entreprise nationale de transport ferroviaire lâche les guichets, et des milliers de voyageurs sont obligés de s’agglutiner derrière les distributeurs automatiques, voire de prendre leur train sans sésame. Que s’est-il donc passé ?

Les équipes techniques de la SNCF ont bien sûr été dépêchées afin de résoudre le problème, mais tout ce qu’elles ont pu faire, c’est établir que le système “Mosaïque”, le serveur central de réservation via guichet, était la principale cause de la paralysie. Un reboot global du système a bien arrangé la situation, mais seulement pour une petite heure avant que le crash survienne à nouveau. N’ayant elle-même que peu d’emprise sur le logiciel installé, la SNCF a alors fait appel au concepteur du système : Microsoft. Après une nouvelle demi-journée de travail pendant laquelle plus aucun guichet n’était à même de délivrer le moindre billet, les conclusions ont commencé à arriver : “ce qui semble pour l’heure certain, c’est que le problème n’a pas été causé par un virus et qu’il est plus probable que le problème soit interne qu’externe.” En français, ça veut dire que le logiciel est buggé, mais qu’on ne sait pas à quel endroit.

D’où réaction logique : retour à la version précédente du système, qui n’avait jamais affiché ce genre de problème. Mais alors, pourquoi diantre est-il encore difficile de se procurer un billet au guichet, deux jours après ? Tout simplement parce que cette ancienne version n’est capable de supporter la charge que de 2800 terminaux sur les 4400 existants aujourd’hui. Et en pleine période de grands départs, difficile de ne pas parler d’un gigantesque pas de géant en arrière. Laissez donc travailler tranquillement les concepteurs du système et débrouillez-vous pour gérer la situation face aux utilisateurs qui le financent en payant leurs impôts.

Montré du doigt depuis plusieurs mois par bon nombre de techniciens et d’organisations syndicales, ce système est à l’image de ce à quoi les administrations publiques devraient unanimement renoncer aujourd’hui : un ensemble de technologies 100% propriétaires. Le fait que, dans ce cas-ci, les technologies en question proviennent de chez Microsoft n’est ici pas le sujet, l’essentiel est de se rendre compte de l’absurdité de la situation. A cause des pratiques obscures d’un concepteur privé, le service public est incapable de gérer tout seul son (onéreux) système informatique, et c’est le public qui trinque.

Aujourd’hui, il existe enfin un remède contre ce type de paralysie : le logiciel libre, dont l’entreprise qui l’utilise possède toutes les clés et sur lequel elle peut elle-même intervenir. Comme je vous l’exposais dans ma précédente chronique, certaines administrations, en France et ailleurs dans le monde, commencent à s’y mettre. Et ce triste événement nous confirme qu’il est plus que temps que ce procédé se généralise partout où la vie des citoyens est concernée.

Et bonjour chez vous !