III-13 (02/05/2004) : Jugement pirate


Vous en avez peut-être entendu parler dans les médias, cette semaine ont eu lieu six arrestations et jugements pour piratage via l’internet de films protégés par droits d’auteur. Cette affaire a été relayée par les médias de masse, comme la télévision et la radio, mais, curieusement, les journaux et magazines plus spécialisés ont été apparemment plus réticents à s’attarder dessus. Pourtant, il s’agit bel et bien d’une première en France, et probablement dans le monde, puisque même les Etats-Unis s’en sont jusqu’ici cantonnés aux fichiers musicaux. Décidément, on n’arrête pas l’exception française.

La tête d’affiche de cette affaire est un retraité breton (ça contraste avec la fillette de 12 ans à qui la RIAA avait collé 2000 dollars d’amende, non ?) qui téléchargeait des films en peer-to-peer et les revendait via un site web où il tenait en ligne son catalogue personnel. D’aucuns auront du mal à éprouver de la pitié face à une telle preuve de bêtise, mais le cas des cinq autres est plus intéressant, dans la mesure où eux ne pirataient que dans le cadre d’une utilisation privée, c’est à dire pour leur consommation personnelle, sans les revendre. Une contradiction totale avec la récente loi européenne stipulant que la cible principale des autorités devait être le piratage organisé et lucratif, donc.

Comme l’a mentionné l’un des accusés en disant “on a jugé six personnes, alors que six millions de Français téléchargent sur internet”, il s’agissait bien sûr de faire un exemple. Un bâton sans carotte, en quelque sorte, puisqu’il n’existe toujours aucune offre de téléchargement légale en France. Les sanctions demandées par les majors allaient jusqu’à 25 000 euros mais ont été échangées par les juges contre une somme de 4000 euros et 3 mois de prison avec sursis. Rappelons que dans notre beau pays, un voleur de voiture multi-récidiviste, pourtant nettement plus nuisible envers la société, s’en tire avec à peine plus. Et encore, il faut que le dossier soit particulièrement béton.

En parallèle d’une LEN liberticide, clairement dictée par ces mêmes majors, que les députés font passer avec une incroyable passivité et que le sénat ose à peine égratigner, cette triste histoire ne fait que confirmer ce qu’on redoutait : en France, les éditeurs ont vraiment le bras long. Et en l’absence de toute offre de substitution officielle, on peut franchement se demander s’ils sont réellement du côté de la culture qu’ils prétendent à cor et cri vouloir défendre.

Et bonjour chez vous !