II-07 (10/11/2002) : Jeux vides et hauts


“Bill Gates rachète le Futuroscope”, ont titré certains journaux la semaine dernière. Et pour cause : c’est bel et bien à lui, enfin à sa société, qu’a fait appel le président du célèbre parc d’attractions technoïdes français de la Vienne. Le but ? Attirer plus de monde. Bon ça, c’est compréhensible, avec une fréquentation en baisse depuis un bon bout de temps déjà. Compter sur les jeux vidéo pour épater une gallerie de technophiles, là encore on le comprend tout à fait, dans la mesure où des moyens techniques énormes sont investis dans le secteur un peu partout dans le monde, et que ça laisse imaginer des nouvelles attractions plus interactives.

Mais là où les intentions apparaissent sous leur aspect le plus noir des obscurs partenariats lucratifs, c’est quand on apprend que c’est Microsoft qui se voit confiée la tâche de présenter les technologies de demain. Je suis conscient d’être toujours sceptique de ce que peut apporter Microsoft à l’informatique, mais qu’on me permette de croire que je sais de quoi je parle avec les jeux vidéo. Car c’est bien un domaine où le géant de Redmond n’a vraiment RIEN apporté !

En remontant une quinzaine d’année en arrière, on s’aperçoit que tout a commencé pour Microsoft avec un “standard en devenir” japonais nommé MSX. Et encore, Microsoft n’a fait qu’en développer le Basic (qu’il n’a pas inventé, contrairement à ce que beaucoup pensent, en passant). Et à la clé, un flop bien profond et l’abandon des jeux vidéo par M. Bill pendant dix bonnes années, pour n’y revenir qu’avec la nouvelle tendance “djeunz” allant de pair avec Windows 95. Microsoft a ainsi signé plusieurs jeux bien réalisés certes, mais bien convenus et absolument pas révolutionnaires. Excepté peut-être Monster Truck Madness, dont la principale originalité est de s’intéresser à un sport délaissé par tous les autres studios, sans oublier de signer le Système d’Exploitation de la Saturn de Sega, avec l’échec cuisant qu’on connait.

Quelques années plus tard naît la Xbox, alias la console la plus puissante du marché mais également la plus impersonnelle. Quand celle de Sony arbore une architecture matérielle peu ordinaire et des outils de programmation spartiates et celle de Nintendo une originalité de look et des jeux, la Xbox ne contient que des composants de PC très classiques, quoique costauds, et n’est supportée que par des studios américains produisant des jeux vus et revus. Qu’on m’explique donc pourquoi Microsoft a été choisi pour représenter l’avenir du jeu vidéo. Peut-être parce qu’il s’agit du constructeur qui a sorti sa console la plus récemment et qui fait tout pour sortir sa prochaine plus tôt que celles des autres ? Ou peut-être tout simplement que la paresse et le manque de clairvoyance de nos politiques les encourage à ne pas voir plus loin que l’image sucrée distribuée par une multinationale américaine aux pratiques ouvertement douteuses ? On imagine dès lors l’honnêteté intellectuelle des “créations” qui seront présentées.

Et ce n’est pas peu dire, quand on sait qui sont les deux autres larrons qui seront de la fête, j’ai nommé Infogrames et Thomson ! Je ne sais pas exactement quel est le degré de “voulu” de la part du vieux papa du Futuroscope, mais il a réuni là une belle brochette de non-créateurs et de représentants de ce que nous appelerons, par politesse, la french-daube. Et comme c’est le contribuable qui paye pour ça, j’ai soudainement encore un peu plus honte d’être français.

J’ai été très impressionné lorsque j’ai visité le parc il y a quelques années, mais il semble que nous pouvons maintenant prononcer sa mort prochaine en tant que vitrine technologique européenne. Peut-être un nouveau double effet “La tête dans les nuages” ? Comme toujours, attention à l’aterrissage.

Et bonjour chez vous !

(remerciements amicaux à Pascal B.)