III-08 (15/02/2004) : Vive le plantage libre !
Il est un pays où les programmes naissent, poussent, grandissent, grossissent et phagocytent, mais ne meurent pas. Dans ce vaste pays où les jardiniers sont très nombreux et engagés à développer plein de nouvelles espèces sans se soucier de leur qualité, de leur viabilité, de leur utilité, de leur taille et de leur constitution face aux agressions extérieures, règne un culte du secret fort compréhensible. De la même façon que les fabricants d’OGM refusent qu’on renseigne de leur présence dans les produits du commerce ou que les fabriques de tabac restent évasives sur les composants présents dans leurs cigarettes, dans ce pays l’ADN des plantes doit rester caché. Et le fait que la plupart des armées du monde utilisent ces espèces de programmes ne change rien à l’affaire, quand bien même si ces derniers pourraient devenir plus envahissants, indiscrets, voire nocifs ou handicapants. Le secret, voilà le secret de la réussite. Evidemment. La preuve : jusqu’ici, ça marche !
Tout allait bien dans ce meilleur des mondes quand un jour survient une catastrophe : l’ADN des deux espèces, labellisées “Windows 2000” et “Internet Explorer”, a été victime d’une fuite. Comprenez que les données qu’ils code ont été révélées sur le réseau planétaire. La faute apparemment à un exportateur du nom de Mainsoft, intermédiaire rattaché au programme “Licences Gouvernementales contre Code Source” auquel participent certains états ayant manifesté un peu plus tôt leur intérêt en faveur des semences libres qui atteignent de nos jours une facilité de culture quasi-identique mais avec une fiabilité, une vitalité et une traçabilité bien meilleures.
Les hautes instances du pays producteur ont tôt fait de dédramatiser la situation, en annonçant que le problème est pris au sérieux, mais que seuls des fragments du code ont ainsi été libérés contre leur gré et que ça ne menace pas la sécurité des utilisateurs. Et d’ajouter, dans un éclair de cette assurance opportuniste qui n’appartient pas qu’aux grands requins de la finance, qu’il s’agit plus d’une affaire de viol de copyright que de problème de sécurité.
Pourtant, nul besoin d’être grand chêne centenaire dans le vaste domaine de l’Informaticus Personalus pour savoir que “quelques fragments” de code ne permettent pas de produire un clone génétiquement modifié, alors que ça peut donner à de la mauvaise graine le moyen de découvrir de nouvelles failles au coeur de deux spécimens dont les caractéristiques communes avec les passoires n’ont, elles, plus rien de secret depuis longtemps. Rappelons que c’est l’ancien président de ce même pays qui affirmait encore il y a quelques semaines, et sans rire, que le nombre important de failles découvertes, de par leur colmatage, contribuaient à renforcer la solidité de ses plantes.
Et bonjour chez vous !