Archive pour 2006

Le brevet anti-anti-pub

dimanche 23 avril 2006

Le concept de spot publicitaire impossible à zapper n’est pas nouveau : les utilisateurs des systèmes d’enregistrement automatique de programmes comme TiVo aux Etats-Unis en savent quelque chose : complètement libres au début de ne pas inclure les sempiternels clips marchands dans leurs émissions enregistrées, ils ont commencé à voir apparaître des pop-ups de réclame pendant leurs phases d’avance rapide jusqu’à ne plus pouvoir couper les tranches publicitaires du tout.

Aujourd’hui, une marque entend généraliser ce combat aux émissions non-enregistrées : Philips. Afin de rendre à la publicité la noble place qui lui revient (et que le président de TF1 nous décrivait si bien il y a un peu plus d’un an de cela), la société vient de déposer le brevet d’un système anti-zapping-pendant-la-pub pour les signaux broadcast. Profitant de l’adoption par de nombreux pays de la technologie de télévision interactive Multimedia Home System, Philips entend ainsi rendre les tranches publicitaires inzappables par le biais de signaux numériques rendant la télécommande inopérante à ces moments-là.

Pas folle, la firme enjoint tout de même à faire attention à la réaction des spectateurs, forcément négative et conseille ainsi de permettre le choix au spectateur entre ce système et le paiement d’une dîme les dispensants des vilains spots, ou à défaut de les prévenir par avance de leur impuissance face à eux. Autrement dit “payez pour ne pas sentir la dégradation du service” : on n’est pas bien loin d’une des multiples formes que peut prendre le racket numérique, à l’instar des services promettant une gratuité éphémère ou instaurant des conditions générales de ventes abusives sans en prévenir les bénéficiaires.

Qu’on se le dise, la publicité fait partie de la télévision et les producteurs tiennent à vous le rappeler par tous les moyens. Vous voulez vous aussi être un artisan de la télévision de demain ? Demandez à obtenir un brevet sur l’impossibilité de faire varier le volume sonore durant les bandes-annonces commerciales avant les films, sur le capteur d’attention qui déclenchera la séquence pub au moment où le spectateur sera le plus sensible au suspense, ou sur un système qui l’obligera à chanter les slogans publicitaires avant de passer au spot suivant… Il ne tient qu’à vous de contribuer à la révolution numérique télévisuelle !

iMacintel : quelques essais

lundi 10 avril 2006

Un proche parent ayant reçu son nouvel iMac la semaine dernière, on peut dire que la sortie de Boot Camp et de la version Mac de Parallels ne pouvaient pas mieux tomber. Boot Camp est la solution officielle d’Apple pour pouvoir installer et démarrer Windows XP sur les nouveaux Macintosh à processeur Intel, et Parallels est un système de virtualisation. La différence est que dans le premier cas, le Mac démarre vraiment sous Windows, alors que dans le second, il démarre un Windows à l’intérieur d’une fenêtre Mac OS : on a ainsi deux ordinateurs tournant en même temps, avec chacun son système d’exploitation et pouvant échanger des données avec l’autre.

Voici un petit compte-rendu de mes découvertes.

iMac

Matériellement, l’iMac 20″ est une belle bête. facile à manipuler car en un seul morceau pas trop lourd, il s’installe très facilement. On le branche au courant, on lui ajoute le clavier et la souris, et c’est parti. L’installation automatique du système pose quelques questions simples et en quelques minutes, tout est prêt. L’écran panoramique affiche une résolution de 1680×1050, donnant vraiment l’impression d’un vaste bureau. Pas de pixel mort, une image claire et bien contrastée, quoi que des sortes de halos lumineux légers apparaissent dans les coins quand il affiche du noir. La rémanence est présente mais supportable. Le réseau sans fil en 801.11g se connecte sans problème avec la clé WPA et, une fois le mot de passe inséré, l’iMac est branché au net. A peine plus de 10 minutes pour en arriver là, tout va bien.

Habitué à mon G4 de 2002, j’ai été surpris par la vélocité de la bête. Il démarre en 30 secondes à peine, les applications se lancent en 1 ou 2 secondes, tout réagit au quart de tour et l’ensemble est fluide. Et avec 1 Go de RAM, même en lançant toutes les applications de la suite iLife en même temps, rien à redire, ça ne rame pas. En affichant l’activité du processeur, on voit bien la prise en charge des deux coeurs comme deux processeurs distincts, la charge d’une application se trouvant basculée sur le second si le premier est déjà sollicité par une autre application. Pour faire court, ça tourne vraiment bien. Les logiciels non-optimisés pour l’architecture Intel, qui tournent grâce un système d’émulation nommé “Rosetta”, tournent assez bien eux aussi, mais cet émulateur semble poser problème avec certaines extensions du noyau et pilotes : quelques outils ont ainsi refusé de s’installer et leur mise à jour se fait attendre. Par ailleurs, l’impression via réseau sans fil sur une imprimante HP PSC 1350 s’est également révélé impossible, alors qu’un PowerMac G4 avec la même version de Mac OS X le fait sans aucun problème et que l’utilisation d’un câble USB au lieu du réseau sans fil corrige le problème. C’est au moment de l’activation du pilote (en version PowerPC) de l’imprimante qu’une erreur (dont j’ai oublié le numéro) survient, et seule l’accès via partage de l’imprimante sur le G4 a pu apporter une solution.

Outre la puissance, un autre élément important : quel silence ! Même en milieu très calme et en poussant l’activité du processeur, on l’entend à peine ! En tant qu’adepte du silence dans mes machines, j’ai vraiment été impressionné par le bruit très faible et constant émis par cet iMac. Le seul élément bruyant est en réalité le lecteur-graveur de DVD. Comme tous les slot-in utilisés par Apple ces derniers mois, ils donnent l’impression de croquer consciencieusement tous les CD qu’on leur donne… peu rassurant au départ, mais on finit par oublier ce détail, qu’on peut néanmoins exploiter pour faire peur à un ami : “Quoi ? mais il fait pas ce bruit-là d’habitude !” ;)

Mais venons-en maintenant aux tests plus sérieux.

Commençons par essayer Boot Camp, le bootloader. Mais avant, il faut mettre à jour le firmware du Mac, avec pour cela un installeur et une notice pour la suite des opérations, qui consiste en gros à éteindre le Mac et à le rallumer en maintenant appuyé le bouton de mise sous tension jusqu’à entendre un bip sonore. Une petite barre se dessine à l’écran et se remplit, et l’ordinateur redémarre comme si de rien n’était. Passons donc à Boot Camp proprement dit.

L’installation de la chose se présente sous la forme d’un assistant qui demande le strict nécessaire et installe ce qu’il faut tout seul. Fonction intéressante, il crée une partition dédiée à Windows sur le disque dur sans détruire les données déjà présentes dessus. Au moment de choisir la taille, voyons grand 50 Gigas. Windows est (lui aussi) assez gourmand et aime être à l’aise. Et puis bon, ce n’est qu’un dixième des 500 Go disponibles. Il demande ensuite de graver un CD-R afin d’y mettre les pilotes qu’il faudra installer une fois sous Windows : là encore, deux clics, une petite minute et c’est réglé.

Tout est prêt, donc tentons le démarrage sous Windows. J’essaye de maintenir la touche C du clavier au démarrage pour forcer à booter sur le CD de Windows XP. Ca marche : on retrouve ce bon vieux programme d’installation réalisé avec tant de goût (il rappelle un écran bleu de la mort). La procédure est ensuite comme pour tout PC : choisir la bonne partition pour l’installation, formatage de celle-ci, copie des fichiers de base, et redémarrage. Cette fois-ci, on maintient la touche ALT et on a bien les deux icônes de disque dur me permettant de choisir celui que l’on veut. On clique sur la partition de Windows puis on valide en cliquant sur la flèche apparaîssant juste en-dessous. Ca y est, on a l’écran de chargement de Windows et l’installation proprement dite fonctionne. Rien de particulier à signaler sur la procédure, si ce n’est que je ne comprends toujours pas pourquoi Microsoft s’amuse à interrompre plusieurs fois l’installation pour demander des réglages au lieu de le faire d’un seul coup, ce qui permettrait d’aller vaquer à d’autres occupations pendant le reste du temps sans avoir à surveiller son écran. Enfin, c’est fini ; temps annoncé = 39 minutes, temps constaté = une petite demie-heure.

Le Mac redémarre une nouvelle fois. Je n’appuie sur aucune touche, pour voir, et c’est Windows qui se lance. Et bougrement vite, qui plus est. Pour avoir la possibilité d’utiliser de nombreux PC flambant neufs sous Windows sur mon lieu de travail, je dois dire que je suis étonné : le Mac semble être un très bon PC sous Windows (!). Inconvénient dû à l’absence de pilote vidéo optimisé : le bureau est en 800×600 et donc tout pixellisé et applati par l’écran panoramique. Si on veut profiter du réseau sans fil, de l’accélération vidéo et autres joyeusetés propre à la machine, il faut maintenant installer les pilotes à partir du CD gravé tout à l’heure. Et là, c’est le drame : en plein milieu de l’installation, la souris et le clavier se figent. Impossible de contrôler la bête, bien que Windows ne soit pas planté : un simple appui sur la touche d’allumage du Mac et Windows s’éteint de manière tout à fait normale. Bon. On redémarre, et on regarde : pareil, souris et clavier bloqués. On recommence en “dernière bonne configuration connue”… toujours pareil. Un dernier essai en mode sans échec… pas mieux. Il va falloir passer par la récupération de Windows : on insère à nouveau le CD de XP, on initie une nouvelle installation et quand il signale un Windows déjà présent, on lui dit de le réparer. Après, c’est comme l’installation précédente.

Pouf, pouf.

Une bonne demie-heure après, de retour sur le bureau de Windows. La souris et le clavier répondent bien. Je tente à nouveau l’installation des pilotes Apple, qui se déroule cette fois-ci sans blocage. Je redémarre la machine afin qu’elle digère bien les pilotes vidéo et constate que le bureau a maintenant la bonne taille par rapport à l’écran. Les fenêtres se déplacent et de redimensionnent de manière fluide, de même que le défilement des pages web. J’active le réseau sans fil, curieusement le signal est perçu comme “faible” alors que Mac OS le voyait “très bon” ou, au pire, seulement “bon”. Je lance les mises à jour de Windows : d’abord 3 patchs, un redémarrage, puis 38 autres mises à jour à télécharger et installer. Un petit quart d’heure plus tard (vive le haut débit), le PC, pardon le Mac redémarre encore. Cette fois, j’ai enfin un Windows complètement opérationnel et utilisable. Ouf !

J’installe quelques programmes pour les tester : VirusScan (fondamental sous Windows…), Firefox, Thunderbird, VLC, Nero (gravage d’un DVD-RW réussi), Office 2002, Google Earth, et enfin VMware en version 5.5. Pour ceux qui ne le connaissent pas, VMware est LE logiciel de référence en matière de virtualisation, et existe pour Windows et Linux. Il se lance sans faire d’histoire sur l’iMac-XP et accepte les quelques images-disque que j’ai sous la main : cet iMac de 2006 est désormais capable de faire tourner les vieux jeux DOS du début des années 90, et avec le son : voilà qui fait plaisir à voir ! J’installe ensuite quelques jeux en 3D qui traînent non loin : Max Payne, Rally Championship 2000, Need For Speed 5, Re-Volt… pas de quoi faire un benchmark de la Radeon X1600 présente dans la bête, j’en conviens, mais mon but est surtout de vérifier que tout fonctionne correctement. Et le bilan est totalement positif : on se croirait vraiment sur un PC. Un PC bien réactif livré grauitement avec le Mac ! …enfin presque gratuitement, vu qu’il faut être en possession d’une licence valide de Windows. Mais si, comme c’était mon cas, le Mac a remplacé un PC décédé, vous devez pouvoir récupérer sa licence.

Au passage, je ne sais pas si Boot Camp permet de démarrer sous Linux, mais je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas possible, et je ne doute pas une seconde que la communauté va se dépêcher de tester ça, et au besoin de modifier ce qu’il faut pour y parvenir. Une marche à suivre pour installer la dernière version bêta de Windows Vista circule depuis hier soir, preuve que Boot Camp a fait son petit effet sur les bidouilleurs. Et c’est tant mieux : plus une machine est ouverte, et plus elle est digne de la plus grande qualité de l’outil informatique, à savoir la capacité d’adaptation à ce pour quoi on le destine.

Avant de finir avec Boot Camp, un détail intéressant : Apple a pensé à ajouter une rubrique “Démarrage” au panneau de configuration qui permet de choisir le disque de boot par défaut du Mac, c’est à dire si on n’appuie pas sur ALT au démarrage. Il sera sage de choisir Mac OS, car après tout, normalement on achète un Macintosh principalement pour le système d’exploitation made-in Apple. A moins d’être littéralement tombé sous le charme du design de la marque, bien entendu.

Bien, sur ce, rebootons Mac OS et passons maintenant à l’autre test intéressant : celui de Parallels, le logiciel de virtualisation pour Mac OS, qui supporte officiellement les nouveaux processeurs Intel. Il est distribué gracieusement en version bêta valable 30 jours. Après installation, le logiciel ouvre un assistant permettant de créer un nouveau PC virtuel. Les connaisseurs de VMware ou de Virtual PC sont ici en terrain connu. Surprise désagréable : Parallels ne gère pas nativement le lecteur CD du Mac, mais seulement les fichiers .iso. Il va donc falloir passer par une image-disque de Windows si on veut l’installer, c’est à dire un clone du CD dans un fichier. Pour ce faire, on insère le disque de Windows et on lance l’application “Utilitaire de disque” d’Apple. Il suffit alors, dans la colonne de gauche, de sélectionner le volume inclus dans le CD et de cliquer sur “nouvelle image”. La copie prend quelques minutes et donne un fichier en .dmg, qu’on s’empresse de transformer en .iso via l’utilitaire Damage Isolation.

Une fois ceci fait, on revient à Parallels et on crée un nouveau lecteur de CD dans le PC virtuel. On lui associe notre image ISO et on démarre. Et là, on assiste à l’installation la plus rapide de Windows XP imaginable : Parallels utilise directement le processeur Intel du Mac, donc à pleine puissance, et comme les accès à l’image ISO sur disque dur sont bien plus rapides que ceux d’un lecteur CD matériel, tout se passe très vite. Une fois Windows installé sur le PC virtuel, celui-ci démarre, très vite également. Mais on se retrouve tout de même avec un système ayant besoin de pilotes spécifiques pour être réellement utilisable. Le lecteur CD prédéfini au moment de la création du PC virtuel pointe sur une image ISO contenant les pilotes à installer pour accélérer l’affichage, permettre de confondre la souris de Mac OS pour plus de praticité, activer le son, synchroniser les horloges, etc. Cependant, les pilotes vidéo ne semblent pas encore au point : le animations sont saccadées et à chaque fenêtre qui se dessine, un carré vide se dessine brièvement autour du pointeur de la souris. Ce n’est pas rédhibitoire, mais franchement pas agréable. Rien à voir avec l’affichage offert par Boot Camp ou même l’optimisation qu’offre VMware. Autre grief : le réseau sans fil ne semble pas géré, même en sélectionnant l’interface correspondante (“en1” au lieu de “en0”) dans les préférences. Mais il semblerait qu’une nouvelle version bêta, que je n’ai pas pu tester, corrige ce problème (entre autres). Enfin, il manque à ce logiciel quelques petites choses qui rendraient les choses tellement plus agréables, à commencer par la possibilité de copier des fichiers d’un bureau à l’autre via simple drag&drop.

Malgré ces défauts, il faut reconnaître que le produit est très prometteur : les logiciels que j’ai pu tester fonctionnent vite (excepté Nero, bien sûr) et sans problème à reporter. Je n’ai pas eu le loisir de faire tourner des jeux sous ce Windows ou même de créer d’autres PC virtuels tournant sous d’autres OS, ayant déjà plus que suffisamment squatté cet iMac qui n’est pas à moi ;)

Ce que je peux dire en conclusion de ce témoignage, c’est que l’iMac Core Duo est une machine qui a tout pour plaire : pratique, puissante et ouverte. Il faut en payer le prix, bien sûr (environ 1800 euros pour le haut de gamme), mais on dispose alors d’un ordinateur costaud et silencieux, avec un bon écran et permettant, moyennant quelques efforts (et une licence Windows) de faire tourner presque tous les programmes disponibles à l’heure actuelle à pleine vitesse. Les machines Apple sous Intel disponibles à l’heure actuelle (iMac, Mac Mini et MacBook Pro) sont peu évolutives à cause de leur design petit et condensé, mais un modèle desktop professionnel devait naître d’ici l’été prochain. En tous les cas, on peut dire qu’Apple a fort bien réussi sa transition vers les processeurs Intel et que la publication d’outils pour y démarrer Windows (voire d’autres systèmes) a le mérite d’en augmenter encore les possibilités d’utilisation.

Apple : le dual-boot officiel !

mercredi 5 avril 2006

Cela fait maintenant presque 10 mois jour pour jour qu’Apple a annoncé un de ses plus gros virages technologiques, celui du passage des processeurs PowerPC à architecture IBM/Motorola aux processeurs x86 d’Intel. Les Macintosh perdaient dès lors leur dernière spécificité matérielle : la puce centrale. Tout le reste avait déjà basculé dans le monde plus standard du PC progressivement au cours des années précédentes : interfaces IDE au lieu de SCSI, cartes PCI et AGP au lieu de NuBus, ports vidéo VGA et DVI… Matériellement parlant, le Mac est donc plus que jamais un PC, à deux exceptions près : le design et le système d’exploitation.

On ne va pas revenir sur le design chez Apple, devenu un véritable cheval de bataille depuis le lancement de l’iMac en 1998 mais qui reste surtout une affaire de goût. Le point du système d’exploitation est nettement plus intéressant, surtout depuis ce passage à l’architecture Intel. Ce dernier rempart matériel tombé, plus rien ne semblait empêcher les ordinateurs à la pomme de pouvoir lancer le système concurrent, l’omniprésent Windows. Pas de chance, il restait un adversaire imprévu à affronter pour y arriver : l’EFI en lieu et place du BIOS. Chacun de ces deux programmes, incorporé à la carte-mère, constitue un peu l’équivalent de l’instinct chez l’homme : les instructions de base implantées dès la fabrication et qui permettent de choisir le système d’exploitation choisi par l’utilisateur. Et à cause du choix de l’EFI, impossible de démarrer Windows XP, ni même le futur Vista.

Pas abattus pour autant, des bidouilleurs sont bien arrivés à une solution artisanale en quelques semaines, mais ça n’était pas l’idéal. Seuls les geeks et les curieux ont vraiment essayé ces manipulations pour la moins fastidieuses, avec formatage obligatoire du disque dur, tout ça pour un Windows XP qui, certes, tourne bien, mais est privé de toute accélération de l’affichage, les pilotes des cartes vidéo étant encore inexistants. Le grand public attendait encore l’arrivée d’un héros, défenseur de la non-technophilie…

Et ce héros est arrivé aujourd’hui, mais venant du côté d’où on n’imaginait même pas qu’il puisse venir : Apple elle-même ! Eh oui, en ce 5 avril 2006, Apple livre une solution gratuite, du nom de “Boot Camp”, pour tous les utilisateurs de Macintosh à processeur Intel pour démarrer Windows XP. Le procédé est simple, s’occupe de tout sans effacer les données déjà présentes, et permet d’obtenir un Windows XP complet (seul le support de quelques gadgets comme la télécommande Apple Remote ou le rétro-éclairage du clavier des portables manque à l’appel). Lancez l’installation du programme, redémarrez en maintenant “ALT”, et voilà… plus qu’à installer Windows XP, que vous aurez bien sûr préalablement acheté.

Une chose qu’on ne peut que reconnaître : ça faisait bien longtemps qu’Apple n’était plus arrivée à surprendre tout le monde de la sorte. Depuis la sortie du premier iMac, il y a 8 ans, toutes les nouveautés et annonces étaient distillées via des rumeurs plus ou moins bien détaillées, y compris la transition vers les processeurs Intel. Apple avait beau pratiquer le culte du secret, il n’était guère efficace qu’auprès du public le moins informé. Mais aujourd’hui, la firme a renoué avec la stupeur générale en livrant ce boot-loader. Le monde informatique est en ébullition depuis cet après-midi, et pour une fois personne pour se pavaner façon “je vous l’avais bien dit”. Flamboyant coup de maître qu’a réalisé Steve Jobs, donc. Reste aujourd’hui à savoir si cette initiative va aider ou desservir le Macintosh. Seul le temps pourra le dire : les premières réactions semblent globalement favorables, mais on n’échappe pas aux funestes pronostics de certains sceptiques y voyant une nouvelle victoire de Microsoft.

Reste que le Mac, capable de lancer les programmes Linux nativement (après l’ajout d’une interface pour X11) et dorénavant de booter Windows XP directement, est bel et bien devenu la machine la plus ouverte du monde ! Quand on se souvient de l’hermétisme de ces mêmes machines il y a encore à peine plus de 5 ans, avant la sortie de Mac OS X, on se rend compte que c’est dans une transition constante que s’est lancée Apple depuis.

CPE : pensées d’un jeune précaire

dimanche 2 avril 2006

Ce blog n’a pas d’ambition politique, même si j’ai eu l’occasion d’y aborder quelques thèmes importants comme les brevets logiciels ou le DADVSI, mais la façon dont évolue l’affaire CPE a le don de passablement énerver l’internaute (et travailleur) que je suis. Je trouve particulièrement navrant de voir qu’une majorité de la population se laisse aller à suivre des lieux communs pour la seule raison que les têtes médiatiques de la scène politique se sont concertées pour les répéter en coeur devant caméras et microphones. Qu’au fond, tout ça n’est qu’une vaste lutte d’influence sur fond de misère sociale dont tous les charognards de la politique entendent se servir pour redorer un masque de grand démocrate.

Aussi, j’ai l’intention, sur ce billet, de lâcher quelques idées qui me sont venues à l’esprit ces dernières semaines. Et je le ferai sous forme d’un empilement et non d’un texte structuré, pour deux raisons : primo je n’ai l’ambition de convaincre personne, il s’agit plus d’un billet d’humeur que d’une tribune, et secundo ça me permettra d’être plus clair, compte tenu de ma propension habituelle à faire des phrases à rallonge bourrées de parenthèses.

Je vois d’ici de ce que vont penser beaucoup des gens qui me liront : “Oh, Celeri est militant UMP à tendance admirative pour Villepin”. Et je sais aussi que j’aurai beau dire que ce n’est pas le cas, ça ne changera rien. Les gens sont comme ça : si on n’est pas avec eux, on est avec l’ennemi. Et tenter d’expliquer qu’on peut être à la fois choqué par la façon dont est introduit une mesure difficile à comprendre et profondément écoeuré par les manoeuvres de ceux qui veulent la combattre, que dans l’histoire le gouvernement a été lamentable mais que l’opposition l’est tout autant, je le sais, ça relève de la gageure. Tant pis. Mais que ceux qui me répondront comme à un zélote chiraquiste ne s’attendent pas à ce que je leur consacre ne serait-ce qu’une minute de mon temps.

Avant de commencer, je tiens à exposer ma situation : j’ai aujourd’hui 26 ans, et j’en avais encore 25 lorsque le texte a été introduit. Par ailleurs, je suis salarié depuis 2002 et n’ai connu que des contrats précaires depuis lors. Mon contrat actuel, même s’il est de trois ans (fonction publique territoriale) peut être arrêté à tout moment sans aucune justification ni indemnité. C’est la vie, et j’ai pris le parti de rester en éveil quant à ce qui pourrait arriver un jour et d’agir en conséquence. Ainsi, même si le CPE ne m’est pas plus destiné, j’estime que mon avis sur la question est au moins aussi légitime que celui des fonctionnaires grévistes, des salariés bien installés en CDI, des politiques payés à vie, des étudiants en mal de rébellion ou des lycéens qui n’ont jamais travaillé ainsi que leurs parents qui regardent tout ça d’un air amusé en se disant que mai 68, c’était le bon temps.

Bien, sur ce, allons-y.

– Que les étudiants manifestent, c’est leur droit. Qu’ils empêchent les autres de travailler en est une autre. La tactique de l’obstruction permet de peser plus fort, mais ça reste une forme de violence imposée à ceux qui prônent d’autres moyens ou qui veulent continuer à travailler. Une violence qui ne vaut pas mieux que celle d’une loi qu’on voudrait imposer de force.

– Les assemblées générales ont-elles réellement organisé de réels débats sur la question ? Les images qu’on a pu en voir un peu partout donnent plus la sensation qu’elles ont été trustées par des décisions d’action que de réflexion, et les têtes de proues du combat anti-CPE des facs/lycées n’hésitent pas à reprendre les exagérations des politiques.

– Notre pays veut-il vraiment se laisser gouverner par des lycéens, a fortiori au sujet d’une mesure qui ne les concerne pas ? La majeure partie d’entre eux vont poursuivre leurs études et d’ici leur sortie, des élections auront eu lieu et le CPE aura été évalué et, au besoin, abrogé. Qu’ils en parlent, fassent des débats, très bien, mais leurs blocages sont, outre illégaux, illégitimes.

– Il n’y a pas plus influençable qu’un lycéen, et les syndicats étudiants en profitent honteusement pour grossir les rangs et les mettre en première ligne. Des professeurs faisant partie de mes proches sont formels : bon nombre d’entre eux se prennent les manifestations comme excuse pour échapper aux cours. De plus, je suis sûr que pratiquement aucun d’eux n’a lu le texte de loi sur le CPE. Et ne parlons pas de ceux qui ont cru comprendre qu’on demandait la démission des Conseillers Principaux d’Education (authentique !).

– J’observe que les médias, depuis le début des échauffourées, ne donnent que très peu la parole à ceux qui sont précisément dans la catégorie visée par le CPE : entre 18 et 25 ans et en situation de chômage ou d’emploi précaire. Et les quelques rares que j’ai pu voir sur un plateau télé avaient un avis nettement plus nuancé que les autres. Tout semble avoir été méticuleusement organisé pour avoir un duel médiatique “jeunes exploités contre vieux exploitants” et “opposition sociale contre gouvernement sanguinaire”, ou quand la France assume pleinement son évolution au rythme des conflits sociaux.

– Comme l’a déjà montré la jurisprudence au sujet du CNE, l’absence de motif de licenciement ne signifie pas qu’on puisse être viré pour n’importe quoi. Les prud’hommes ont toujours pour mission de punir les abus. Ne pas être obligé de donner le motif de licenciement n’équivaut pas à ne pas avoir besoin de motif. Et contrairement au licenciement “classique”, l’employeur est obligé de prévenir les institutions représentatives du personnel, qui sont plutôt fouineuses et protectrices de l’employé en général.

– Les syndicats omettent volontairement de parler des protections réservées au titulaire d’un CPE. A commencer par les indemnités en cas de licenciement : droit à la formation au bout du premier mois, 8% de la totalité des salaires perçus. Celui qui sera renvoyé au bout de 23 mois aura donc l’équivalent de presque 2 mois de salaire. Savez-vous à combien vous avez droit en cas de licenciement après la même durée en CDI ? Rien du tout !

– Tous ces jeunes français qui manifestent semblent atteints d’une illusion collective puissante, celle du CDI-nirvana, le travail à vie. C’est quelque chose auquel il est dangereux de croire. Les clauses “incompatibilité d’humeur” ou “insuffisance professionnelle”, valables pour la rupture d’un CDI, sont là pour le rappeler. Et, pour information, même si on gagne aux prud’hommes après ça, on ne garde pas son poste pour autant.

– Autre illusion généralisée : ce n’est pas le gouvernement qui crée des emplois, ce sont les employeurs. Que ça plaise ou non, c’est eux qu’il faut convaincre d’ouvrir des postes. On n’aime pas entendre les patrons parler de “risque financier” à propos de création d’emplois, mais c’est pourtant la réalité, du moins dans le privé.

– Dans les médias, c’est toujours noir contre blanc : on parle des mauvais patrons (en essayant de faire croire au passage que tous les sont), mais jamais des mauvais employés. Pourtant ces derniers existent : ceux qui en font le moins possible en profitant de leurs avantages particuliers, ceux qui changent d’entreprise juste après avoir eu leurs formations, ceux qui se se syndicalisent pour être indéboulonnables, etc.

– L’argument selon lequel le CPE défavorisera les jeunes en matière d’emprunts est très exagéré. Certes, obtenir un emprunt est difficile quand on est jeune et précaire, mais dans les pays comme les Etats-Unis où tout le monde est dans cette situation, ça n’empêche pas les banques de prêter de l’argent. D’ailleurs là-bas pratiquement tout le monde vit à crédit et les banques s’en sortent très bien. Etonnant, non ?

– Concernant la difficulté de se loger si on est précaire, là aussi apparemment on aime à se tromper. En France, même un jeune en CDI a besoin d’une caution pour louer. L’origine du problème est plutôt à chercher du côté du manque de logements et la quasi-impossibilité de virer un mauvais payeur : en France, à cause des procédures, on ne peut rien faire contre un locataire, même plein aux as, qui ne verse qu’un loyer sur trois. De nombreux retraités qui ont besoin pour vivre du loyer d’un patrimoine qu’ils ont consacré leur vie à payer se retrouvent ruinés à cause de gens comme ça.

– “Même à moins de 26 ans, on veut pouvoir faire des projets d’avenir”, voilà qui prête à sourire. Certes, l’idée en elle-même est louable, mais dans la bouche de tant de jeunes, ça reste de la mauvaise foi. En France, on se marie et on a des enfants de plus en plus tard (quand on en a), et il me semble que les contrats les moins précaires devraient être réservés à ceux qui sont le moins mobiles, qui ont déjà une famille à nourrir et une maison à payer. Et qu’on ne vienne pas me dire que la précarisation en est justement la cause : étant jeune moi aussi et fréquentant des jeunes, je sais qu’à notre âge rares sont ceux qui rêvent de se “poser” tout de suite.

– L’utilisation du 49-3 est brandie comme “anti-démocratique” par une opposition qui semble oublier qu’elle-même l’a utilisé 38 fois (!) en l’espace de 5 ans (de 1988 à 1993, gouvernements de Michel Rocard, Edith Cresson et Pierre Beregovoy). De plus, suite à l’annonce du 49-3, elle n’a pas déposé de motion de censure dans les 24 heures, comme elle pouvait le faire… elle est donc bien malvenue de critiquer l’utilisation du 49-3 si elle n’utilise même pas son droit constitutionnel d’opposition.

– L’article 8, donc le CPE, a bel et bien été voté par le parlement. Le 49-3 a été utilisé ensuite, pour permettre de faire passer le reste du texte sur l’égalité des chances, alors que le débat s’enlisait dans une guerre de procédures lancée par l’opposition pour gagner du temps. Qui plus est, les sénateurs ont eux aussi voté le texte (pas de 49-3 au sénat). Et comme ils l’ont modifié, le projet de loi est revenu en commission paritaire où il a été à nouveau voté en intégralité. L’idée selon laquelle le débat a été occulté est totalement fausse, quoique largement utilisée.

– Au risque d’en étonner certains, demander au Premier Ministre de retirer une loi qui a été votée par le parlement est comme lui demander d’en appliquer une qui aurait été rejetée : constitutionnellement impensable. C’est une conséquence immédiate de la séparation des pouvoirs, pillier de base de notre constitution. Il paraît effroyable que tant de gens, et pas des moins instruits en matière de droit, ignorent (ou feignent d’ignorer) ce point essentiel.

– Certes, s’entêter à garder un texte dont personne ne veut, ce n’est pas une bonne façon de mener un débat, c’est là la grande faute de Villepin. Mais poser comme condition avant toute négociation de totalement retirer un texte (surtout quand c’est impossible juridiquement), difficile d’appeler ça une volonté de rétablir le dialogue. Une condition sine qua non est toujours de nature à tuer le débat.

– A propos de fonctionnement des institutions, il est limite aberrant que pratiquement tous les politiques de gauche et tous les syndicats reprochent à Jacques Chirac de promulguer une loi qui a été votée par le parlement et les sénateurs, puis validée sans réserve par le Conseil Constitutionnel. Ah oui, dehors il y a les gens avec des banderoles… Si De Gaulle était là pour voir tant de gens croire que de la République est censée privilégier les slogans réducteurs à des textes débattus et votés démocratiquement, il ferait une seconde rupture d’anévrisme.

– On entend beaucoup de propos qui se résument à quelque chose comme “L’UMP a la majorité absolue, c’est trop facile !”. La réponse est simple : qui a voté pour tous ces députés en 2002 ? Que ceux qui ne sont pas contents de l’oeuvre accomplie votent ailleurs en 2007, c’est comme ça que les choses fonctionnent.

– Avant, quand on me demandait ce qu’était la démagogie, j’essayais de l’expliquer par une définition. A partir de maintenant je citerai François Hollande : “si en 2007 nous [les socialistes] revenons au pouvoir, nous abrogerons le CPE.” Considérant que cela a été dit alors que les manifestations battaient déjà leur plein, l’exemple est parfait.

Pour terminer, voici mon idée la plus personnelle sur le sujet. L’opposition a beau jeu de dire que le premier ministre ferait mieux de taire ses ambitions personnelles et de penser à l’intérêt général. Personnellement, j’ai du mal à voir où se situe l’ambition personnelle dans le fait de s’obstiner à faire passer une loi qui réunit tout le monde contre elle. En politique, l’ambition personnelle implique la recherche la popularité et l’adhésion, il me semble.

Considérant qu’un parti au pouvoir, à l’approche des élections, n’a pour objectif que celui de se faire réélire, on se doit d’être interpelé par tant de zèle concernant le CPE. Nous n’en sommes plus qu’à un an avant les prochains scrutins, et pondre une mesure qui serait mal perçue à ce moment-là est équivalent à un suicide politique… sauf si on est VRAIMENT convaincu que ce qu’on fait va améliorer les choses. Et si on y réfléchit sérieusement, on se rend compte qu’on a ici deux hypothèses :
1) le gouvernement cherche à faire passer le plus vite possible une loi dont il est sûr et certain qu’elle lui apportera le sursaut de popularité nécessaire à sa réelection ;
2) le gouvernement veut tout faire pour être sûr de ne pas être réélu en faisant le maximum de dégâts dans l’opinion avant les échéances.

Alors, selon vous ? Personnellement, je penche plutôt pour la première hypothèse. Même si j’ai été globalement déçu par l’UMP pendant ces 4 années au pouvoir, je pense que pour une fois on s’approche de ce qu’on pourrait qualifier de “courage politique”. Et rien que pour ça, le CPE mérite qu’on lui accorde notre confiance. Pas éternelle, non, mais au moins jusqu’à ses premiers résultats. Et d’ici un an, nous serons fixés et saurons quoi faire.

Pour finir, un rappel sur les intentions de ce billet : il ne s’agit pas de soutenir l’UMP (qui a déjà perdu ma confiance depuis un bon moment) ou de prétendre que le CPE sera bon. Même en tant que jeune précaire, je ne sais pas s’il sera efficace. Ce que je veux dire ici est se résume en deux points :

  • le CPE a été introduit de manière calamiteuse mais étant donné que ce sera sûrement la dernière grande initiative en matière d’emploi de l’actuelle légistlature, il vaudrait mieux lui laisser une chance de montrer ses résultats, quitte à le corriger par la suite ;
  • les mouvements d’opposition au CPE, tout en prétendant vouloir le débat, sont franchement outranciers dans leurs procédés d’action et de désinformation.
  • DADVSI et l’interopérabilité : un complot ?

    mercredi 22 mars 2006

    Un des rares mesures à avoir été reçue assez positivement par tout le monde dans la loi DADVSI est l’amendement de l’article 7 prévoyant un devoir d’interopérabilité entre les vendeurs de musique. Après tout, il semble normal, tout comme un lecteur CD quelconque doit être lisible sur n’importe quel lecteur, que tout morceau acquis via un magasin en ligne soit utilisable sur n’importe quel baladeur. En fait, cette mesure est même tellement logique qu’avec un brin de cinisme, on arrive à se demander ce qu’elle fait dans cette loi si favorable à l’entreprise du disque.

    Car oui, il ne faut pas se voiler la face, cette loi DADVSI a été complètement supervisée par les lobbys de l’industrie du contenu multimédia : ces énormes multinationales ne cachent même pas leur fantasme d’en rester à un modèle commercial où la musique reste intimement liée à un support physique. Après tout, ça permet de rendre l’axiome fallacieux du “copier un MP3 c’est comme voler une baguette de pain” tellement plus efficace. L’intérêt des majors est simple : empêcher les consommateurs et les artistes d’être indépendants, donc les empêcher de traiter directement ensemble. Passer par la case “éditeur” doit rester indispensable. Et pour cela, rien de mieux qu’imposer des DRM, par la loi s’il le faut. Une fois ces procédés légalisés, il suffit de criminaliser les utilisateurs qui les contournent et d’ “informer” les artistes, en marginalisant au besoin qui y sont opposés.

    D’où est donc venu cet amendement sur l’interopérabilité ? Il a été déposé par Richard Cazenave, député UMP pourtant très favorable aux autres articles liberticides de la loi, et alors que les députés PS qui avaient déjà auparavant averti des menaces pesant sur l’interopérabilité s’étaient presque fait rire au nez. Cela ne cache-t-il pas quelque chose ?

    Les analyses sont unanimes : cet amendement pose un problème aux plate-formes de musique en ligne telles que nous les connaissons aujourd’hui, à commencer par la plus populaire dans le monde entier : l’iTunes Music Store d’Apple. Apple a, disons-le tout net, lancé la musique en ligne à elle toute seule. Grâce à des prix et des limitations raisonnables, elle a réussi un pari audacieux : faire payer de la musique à des gens qui pouvaient très bien se la procurer, illégalement mais grauitement, via P2P. En quelques années, plus d’un milliard de morceaux ont ainsi été dûment payés. Le lancement des plate-formes concurrentes n’a eu lieu que bien plus tard : Real (service Rhapsody), Sony (portail Connect), Napster (version légale), Universal (via e-compil), Microsoft, tous ont suivi le courant en se coalisant autour du format WMA de Microsoft. Par souci d’interopérabilité ? A voir, dans la mesure où ils n’avaient pas vraiment le choix s’ils espéraient lutter contre le mastodonte Apple. Apple qui ne veut pas partager, il est vrai, et qui s’obstine à laisser iTunes et iPod exclusifs l’un par rapport à l’autre.

    Tout cela fait qu’aujourd’hui, Apple est montrée du doigt comme le vilain impérialiste des fichiers protégés illisibles sur autre chose qu’iTunes et l’iPod. On attendait donc de savoir comment la firme allait réagir. Ce qui est fait depuis ce matin, par le biais de son porte-parole Nathalie Kerris :

    L’implémentation française de la directive européenne sur les droits d’auteurs va engendrer une forme de piratage parrainée par l’état. Et si cela arrive, la vente légale de musique va chuter au moment même où elle commence à gagner face au pirage.

    Au-delà de cette grosse claque à peine voilée en direction de messieurs Donnedieu de Vabres et Vanneste, que va-t-il se passer ensuite ? Bon nombre d’analystes prévoient qu’Apple va se retirer du marché de la musique en ligne si la loi devient effective après son passage au sénat. Compte tenu du business model “iTunes + iPod”, ce serait une réaction logique. Très logique…

    …Trop logique ? Et si la volonté derrière cet amendement prônant l’interopérabilité était tout simplement d’évincer Apple du marché français ? On sait depuis longtemps que les dirigeants de Vivendi-Universal n’ont pas digéré l’insolent succès d’Apple sur le marché de la musique et qu’ils sont prêts à tout pour parvenir à déloger le méchant impérialiste américain qui ose leur tenir tête en bornant les prix à sa convenance et en permettant un nombre illimité de gravures. On parle beaucoup de chauvinisme industriel ces jours-ci, et on pourrait en voir ici une autre façade : comment une multinationale américaine, qui n’est même pas producteur de musique, peut-elle contrôler plus de la moitié d’un secteur de la culture française ?

    Nul doute qu’en France, Apple est un concurrent très gênant. D’abord, elle n’est pas française. Ensuite, son coeur de métier n’est pas la musique. De plus, elle arrive à entretenir une image “cool” que n’ont pas les éditeurs, lesquels passent surtout pour des rapiats pleurnichards. Enfin, ses choix technologiques rendent l’interopérabilité coûteuse. En effet, si tous les magasins devaient fournir des musiques compatibles iPod, donc au format AAC, ça ferait que tous les fichiers devraient exister en deux exemplaires. D’autre part, l’iPod demeurant très lié au Mac, les concurrents d’Apple devraient dès lors rendre leurs fichiers et leurs logiciels compatibles avec lui (et avec Linux, en passant), ce qui ne leur approterait pas grand-chose étant donné la faible part de marché d’Apple pour les ordinateurs, et que la majeure partie des utilisateurs de Mac préféreraient iTunes de toute façon. Mais si Apple devait quitter la musique en France, cette ouverture technologique imposée par loi n’aurait plus lieu d’être.

    Tout ceci n’est qu’une possibilité, ils est difficile d’être affirmatif. Mais avouez tout de même que cet amendement déposé un peu à la surprise générale comparé aux autres mesures de la loi laisse songeur. Bien sûr on pourrait dire qu’Apple n’est pas le seul visé par cet amendement. Certes, mais tous les autres utilisent le format WMA de Microsoft, à commencer pat le plus gros concurrent franco-français : la Fnac, qui connait un certain succès… si on met de côté la suprématie d’Apple, que certains aimeraient sans aucun doute récupérer si ce pionnier venait à quitter le marché. Alors, après l’amendement Vivendi pour tuer le logiciel libre, l’amendement Fnac pour bouter iTunes Music Store hors de France ?

    Les DRM consomment de la batterie

    mardi 21 mars 2006

    Les DRM, autrement dire les Moyens Techniques de Protection (les MTP adulés par notre ministre de la culture) sont des dispositifs matériels ou logiciels estinés à assurer le contrôle par les éditeurs de ce que vous faites de la musique (chèrement) achetée.

    Les voilà depuis quelques jours sous le feu d’un projecteur ennuyeux : les batteries des baladeurs. Il semblerait en effet que la lecture de fichiers protégés provoque une augmentation de la consommation d’énergie des lecteurs portatifs. En soi, c’est logique : le cryptage représente une certaine quantité de calculs supplémentaires à effectuer par le processeur de la machine. Mais on ne s’attendait sûrement pas à 25% de surconsommation !

    Les tests ont été menés sur plusieurs baladeurs capables de lire les fichiers protégés en WMA (Microsoft/PlayForSure) et font tous état de cette diminution d’un quart de la durée de vie de la batterie, ce qui est énorme. Le format d’Apple sur son iPod a lui aussi été testé, et même s’il est beaucoup moins gourmand, entraine néanmoins une perte d’énergie de 8% environ. Les DRM se heurtent donc à un nouvel arguement contre eux, la consommation des baladeurs étant un de leurs principaux critères de choix.

    Screeners : dénoncez-les !

    mercredi 15 mars 2006

    Après les Etats-Unis qui ont voté une loi criminalisant les gens enregistrant sur caméscope les films dans les salles de cinéma (à des peines équivalentes à celles encourues par les grands trafiquants et contrebandiers, certains meurtriers ou violeurs d’enfants) voici que le Canada prend à son tour de nouvelles initiatives lutter contre ce phénomène : la délation avec récompense.

    Offrir jusqu’à 500$ aux employés de salle qui ont aidé la police à appréhender un vilain copieur de films, une bonne solution pour éradiquer les screeners ? Bien sûr, pirater un film au cinéma pour le mettre sur des réseaux P2P, c’est moralement mal. Mais on ne peut s’empêcher de sourire en lisant ceci :

    Une fois que la bande vidéo ou sonore est enregistrée par caméscope une seule fois, c’est une question de jours ou même d’heures avant que le film soit téléchargé sur des sites pirates sur internet. En un temps record, les pirates ayant accès à cette copie « maîtresse » la revendent à des manufactures illégales qui les reproduisent à la chaîne, les emballent et les expédient pour la vente sur le marché noir. Les petits distributeurs les offrent alors à travers le pays et même outre-mer. Les copies illégales de films se retrouvent dans les marchés aux puces et sur la rue, sur les sites d’enchères par internet ou sur des sites web quelques jours seulement après leur sortie en salle.

    Les films piratés au caméscope sont peut-être en effet vendables en marché noir dans les pays qui n’auront le privilège de voir le film que longtemps après sa sortie. Mais sur l’internet là on peut sérieusement en douter : qui achèterait une copie pirate sur eBay alors qu’elle est disponible en P2P ?

    Elément important à prendre en compte : la qualité des films ainsi diffusés. Entre un tel enregistrement et un DVD ou un DivX, il n’y a pas photo, comme on dit. Un screener ne fournira jamais la même expérience qu’une projection sur toile, qu’un disque du commerce ou un rip fait dans les règles de l’art. On peut donc difficilement imaginer quelqu’un conserver un film piraté au caméscope dans sa vidéothèque à la façon d’un DVD. J’ai tendance à penser que le seul effet réel, dans nos pays occidentaux, est de permettre aux spectateurs de voir un film qui n’est pas diffusé en salle près de chez eux ou de choisir s’ils iront voir le film au cinéma ou pas.

    Rappelons également que depuis l’arrivée des équipements de projection numérique, les pirates au caméscope ont une concurrence sévère : celle des certains employés de salle de cinéma qui n’hésitent pas à faire et diffuser de bien meilleures copies que ce que peuvent faire les autres pirates. C’est ainsi que les épisodes I et II de Star Wars se sont tous retrouvés sur le net en bonne qualité avant même leur première. Les éventuels spectateurs dénonçant de telles pratiques, nettement plus dommageables pour l’industrie du film, seront-ils récompensés ?

    Les cadeaux, il faut parfois les demander

    jeudi 9 mars 2006

    Dans la vie, il y a deux façons d’envisager les cadeaux : comme des actes qui doivent être spontanés ou comme des choses à demander qu’on vous fasse. Et inutile de vous révéler laquelle permet d’en recevoir le plus : les dictons comme “qui ne tente rien n’a rien” ou “il n’y a rien à perdre à demander quelque chose” le font mieux que moi.

    Se retrouvant en possession de 100 timbres non usagés, un “average guy” américain s’est proposé d’écrire une lettre à autant de compagnies pour leur demander de lui envoyer quelque chose de gratuit : produit, échantillon, bon d’achat, n’importe quoi. Il consigne les résultats de son expérience (jusqu’ici 13 cadeaux pour environ 60$) sur le site web qu’il a ouvert pour l’occasion, et en profite pour faire quelques commentaires personnels.

    On pourra sûrement arguer que l’idée n’est pas nouvelle et que d’autres personnes l’ont fait avant, mais la lecture du compte-rendu vaut tout de même le coup, ne serait-ce que pour certaines lettres. Car l’auteur a bien fait les choses : ce sont réellement 100 lettres personnalisées qu’il a écrites, certaines très directes :

    “Dear Sir or Madam: I love traveling. Please send me a coupon for a free or discounted rental car. It will be good karma. Thank you in advance.”

    …et d’autres plus amusantes :

    “Dear Sir or Madam: I’m going to be honest with you. I am a poor slob who drives a bike. Not a motorcycle – a bicycle. Please send me a BMW keychain, so I can at least pretend to have some class when I’m around people. Thank you in advance.”

    Bref, un bon petit site pour nous rappeler que dans la vie, la générosité est un trait de caractère qui a souvent besoin d’être titillé.

    Hackez mon Mac !

    jeudi 9 mars 2006

    Avant-hier, on apprenait qu’un mini-challenge avait été organisé par un possesseur d’un Mac Mini, le principe étant de s’ajuger les droits d’administration de la machine (mode “root”) et donc de pouvoir en modifier les fichiers.

    La mise a l’épreuve n’a pas duré bien longtemps : quelques heures avant qu’un petit malin y parvienne, au bout d’environ 30 minutes de manipulations. Interviewé, le hacker nommé “gwerdna” a révélé avoir utilisé des failles pour l’instant non publiées du système Mac OS X, lesquelles seraient nombreuses selon lui.

    Il convient néanmoins de tempérer l’événement. En effet, l’initiateur du concours était parti sur l’idée d’ouvrir un compte local pour tous les participants au concours. Chacun d’eux avait donc un accès direct à la machine, permettant de passer des commandes à distance (via l’internet) comme s’il était directement en face ou sur le même réseau local. Il s’agit donc de “indoor hacking” et non d’une réelle intrusion de l’extérieur : le hacker n’a eu qu’à faire ce que dans le jargon on appelle une escalade de droits afin d’accéder aux droits d’administration en partant de droits standards. On ne parle donc pas ici réellement de sécurité de la machine vis-à-vis de l’internet, mais plutôt de la sécurité à l’intérieur d’un groupe de travail, ce qui n’est pas du tout la même chose.

    Afin d’illustrer la différence entre les deux notions, un autre internaute a lancé un concours rigoureusement équivalent, à ceci près que les participants ne disposaient pas de compte dès le départ. Le test a ainsi duré 38 heures, et aucune prise de contrôle n’a été ni constatée ni revendiquée, malgré le demi-million de requêtes via le web et les 4000 tentatives de connexion à distance via SSH (lignes de commande).

    Voilà qui rétablit un peu l’équilibre. La presse en ligne spécialisée, elle, a fait largement écho au premier épisode de cette affaire, comme on pouvait s’y attendre. En effet, on a l’impression que depuis que le Mac est de retour sur le devant de la scène informatique grand public, jusqu’ici monopolisée par Microsoft, se croire à même de prétendre que le Mac est mal protégé devient branché… Une façon d’exorciser le mal chez les adeptes de Windows ?

    Bien sûr, et comme le précisent également les organisateurs de ce second test, ceci ne prouve pas l’infaillibilité totale du système. D’ailleurs ce n’était pas son but, même si une machine grand public (un Mac Mini) en configuration standard a quand même bien tenu le coup face à une rafale d’attaques organisées. Ce qui est à retenir est qu’il faut toujours bien préciser les conditions dans lesquelles un test est mené, et ainsi quel type de sécurité est mise en jeu.

    Lire son courrier en dansant

    vendredi 3 mars 2006

    Les joueurs de Playstation ont sûrement déjà essayé “Dance Dance Revolution”, un jeu de danse qui se pilotait au moyen d’un tapis muni de gros bouton sur lesquels poser ses pieds en rythme.

    Hier, Microsoft a dévoilé un projet actuellement paufiné par ses laboratoires : le StepUI. Il s’agit donc d’un tapis permettant de piloter des logiciels : StepMail, un logiciel de messagerie, et StepPhoto, un organiseur de photothèque.

    StepUI

    La principale motivation derrière ce projet est la santé : l’objet entend lutter contre l’obésité, le manque d’exercice et les troubles articulatoires, symptômes régulièrement reprochés aux longues heures passées en position assise devant l’ordinateur.

    On peut néanmoins se demander si la chose est vraiment pertinente, du moins en l’état. Passe-t-on suffisamment longtemps à lire son courrier ? Le dispositif ne permet en effet que de le consulter, imposant donc de retourner sur le siège dès qu’on veut y répondre ou faire autre chose. En fait, le dispositif manque cruellement d’un dispositif de pointage (type souris) et d’un de saisie (type clavier). Reconnaissance vocale indispensable ?

    De plus, pour permettre de bien bouger, il doit être couplé à un grand écran, que peu de gens possèdent. Sans parler du fait que des exercices désordonnés ne sont que rarement efficaces, et qu’on imagine difficilement la lecture de courriers proposer un exercice bien organisé.

    Attendons donc de voir l’idée, encore au stade de projet, se concrétiser, mais sans non plus se bercer d’illusions : il n’y aura jamais meilleur sport que celui qu’on fera sur son temps libre, dans un état d’esprit frais et dispos.