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Freebre optique

mardi 12 septembre 2006

En ce jour où le pays berceau de l’internet se recueille autour de ruines qui n’ont sans doute pas fini de faire parler d’elles, c’est en France qu’est annoncé ce qui se veut être pas moins que la première offre d’accès grand public par fibre optique au réseau mondial. Et c’est Free, le trublion de l’internet français, qui tient la vedette. Au programme : des débits de 50 Mb/s en envoi comme en réception, télévision en haute-définition, téléphonie illimitée, le tout pour 30 euros tout compris. Boum.

On pourrait dès lors se croire dans une scène en tout point similaire à celle d’il y a 5 ans, quand Free annonçait son offre ADSL à 30 euros quand France Télécom Wanadoo, alors en monopole de fait, proposait la même chose pour un prix trois fois supérieur. Mais ce serait négliger que cette fois-ci, Free entend bien exploiter un réseau qui sera entièrement sien, des centraux aux modems en passant par les répartiteurs.

Non sans une certaine ironie, Free a même promis de louer son futur réseau à ses concurrents. Ironie face à Wanadoo Orange, qui a elle-même annoncé un réseau en fibre optique il y a de cela quelques semaines, mais en s’assurant d’une couverture ministérielle dans sa volonté de ne pas vouloir d’un “dégroupage optique”. Free en profite pour se donner une image de partenaire des structures plus petites, et notamment des collectivités territoriales. Ou comment railler la privatisation totale de l’opérateur historique.

Mais Free ne s’arrête pas là : un peu plus tard dans la matinée, Free a annoncé vouloir faire bénéficier d’un accès gratuit. Bien sûr, le service fourni sera bridé par rapport à la version “normale”, mais contiendrait tout de même un accès “bas” débit, la téléphonie et les chaînes gratuites de la TNT. Grâce à lui, plus besoin de payer l’abonnement d’une ligne Orange France Telecom, ni de s’acheter un décodeur pour la télévision numérique terrestre. Officiellement, Free entend ainsi lutter contre la “fracture numérique”.

Oui mais laquelle, de fracture numérique ? Côté pécuniaire peut-être, mais qu’en sera-t-il de sa facette géographique ? Free a déjà expliqué son plan de déploiement : la fibre optique sera déployée prioritairement dans les zones où ses parts de marché sont supérieures à 15%. Autrement dit, les zones déjà bien couvertes par l’ADSL. Les campagnes, comme d’habitude, pourront toujours attendre. D’autre part, quelques voix s’élèvent déjà pour dénoncer ce qui pourrait bien s’apparenter à une astuce juridique : la fondation “Fondation Free” viserait moins à démocratiser l’accès à l’internet qu’à contourner les réglementations de la concurrence, et notamment au chapitre “dumping” (vente à perte).

Reste à voir ce qui sortira effectivement du chapeau de Free, qui est connu pour être friand des grands effets d’annonce, même s’il tiennent leurs promesses la plupart du temps (sauf pour les non-dégroupés, de plus en plus mécontents). Rendez-vous donc au premier semestre 2007, période annoncée pour l’arrivée des premières “Freeboxo”…

Le Baron Google

vendredi 11 août 2006

Ce qu’il y a de bien avec les technologies de Google, c’est qu’en plus d’être efficaces, elles sont basées sur des standards ouverts et sont donc faciles à intégrer. En voici un bel exemple qui se base sur Google Maps, plus précisément sur les images-satellite du moteur : le premier simulateur de vol grand public couvrant la terre entière !

L’idée est archi-simple : dessiner un petit avion en 3D pilotable au clavier en-dessous duquel on fait défiler les cartes de Google !

Google FlightSim

Pratique pour aller visiter le château de Versailles !

Comme vous le savez probablement, il est interdit de survoler les villes avec un avion personnel, à cause d’une hauteur minimale assez élevée à respecter. Voici donc l’occasion de vous amuser en toute impunité ! Vous pouvez même tirer des obus explosifs avec la barre d’espacement du clavier (tirez en descente pour qu’ils touchent le sol) et vous écraser si vous souhaitez, même si les dégâts causés par votre avion sont pour ainsi dire nuls… eh oui, il faudra être plus audacieux que ça pour jouer les apprenti-terroristes !

Autosatisfaction photographique

dimanche 6 août 2006

Il est assez rare que j’aie l’impression de vraiment apprécier une photo que j’ai prise moi-même, aussi j’ai décidé de partager celle-ci avec mes lecteurs :

Mignon, non ?

C’est-y pas mignon ?

Elle n’a pas été facile à prendre car utiliser un flash aurait fait outrageusement saturer le plancher, déjà bien éclairé par la lampe de jardin. Obtenir une photo assez nette n’a dès lors pas été facile. Le boîtier était posé sur le sol mais sa base n’étant pas plate (hélas, voyez les aberrations auxquelles nous amènent le fait de vouloir faire un design plus cool qu’efficace), il a tout de même fallu rester sans bouger pendant quelques secondes. Heureusement que le modèle, lui, excellait dans cet art ;)

DADVSI : le CC durcit encore plus

vendredi 28 juillet 2006

Le tout dernier épisode législatif de la loi sur les droits d’auteur, le DADVSI, était attendu. Après le vote d’un texte globalement liberticide en première instance à l’assemblée, puis d’une version durcie du texte par les députés (interopérabilité non requise, copie privée non garantie, etc.), bon nombre de citoyens espéraient que le conseil constitutionnel allait imposer un certain retour vers l’équilibre entre les consommateurs et les éditeurs.

Eh bien c’est raté ! Les quelques rares points sur lesquel l’esprit optimiste pouvaient encore tenter de s’accrocher ont été balayés d’un revers de main par la décision des sages.

Maître Eolas nous informe des modifications apportées par le conseil, parmi lesquelles on remarque que :

– La réduction des peines à quelques dizaines d’euros par infraction est annulée : retour donc à la case prison (3 ans) et à la fort sympathique amende de 300 000 euros, peines applicables théoriquement pour le moindre fichier piraté. Et dire que le gouvernement lui-même disait qu’il était inconcevable de risquer la prison pour une infraction de ce genre…

– La tolérance de contournement des protections pour motif d’interopérabilité, pourtant fer de lance du ministre de la culture, passe à la trappe : aucune excuse ne sera acceptée poru utiliser un fichier autrement que de la façon dont l’exige son éditeur.

– Les exceptions au droit d’auteur ne doivent JAMAIS faire obstacle à l’ “exploitation normale de l’oeuvre” (i.e. exploitation commerciale) de l’oeuvre ou porter préjudice à ses ayant-droits. Autrement dit : la copie privée, même unique (copie de sauvegarde) n’a pas à être imposée aux éditeurs qui peuvent donc empêcher toute copie.

– Le fait d’éditer un logiciel qui pourrait servir à copier des fichiers protégés ne bénéficiera plus de la protection accordée aux logiciel de travail collaboratif. Pas de bol pour les développeurs de logiciel français, la copie de données – donc de fichiers – est la base même de l’internet. Le risque d’être considéré comme un criminel en développant un logiciel communicatif risque d’être constant.

Comme le souligne Eolas, le feuilleton DADVSI aura été l’occasion d’assister à un double effondrement : celui des libertés de l’utilisateur qui paye (souvent cher) ses produits mais également celui de notre ministre de la culture, dont toutes les innovations-phare ont été balayées coup sur coup par le sénat, puis par le conseil constitutionnel. Pas besoin d’être juriste ni informaticien pour se rendre compte que cette loi n’est rien d’autre, au final, qu’un ensemble inapplicable de règles favorisant les éditeurs.

Pourtant, et n’allez pas croire que j’aie souvent des tendances optimistes, j’ai tendance à croire que c’est ce qui pouvait arriver de mieux pour les opposants au texte. Je ne doute pas une seconde que cette version finale du texte, franchement inapplicable en l’état, va mettre tout le monde en colère. Les seuls gagnants dans l’histoire sont les éditeurs et les artistes du Top-50. Les utilisateurs voient leurs droits d’utilisation bafoués, les “petits” auteurs se rendront compte qu’ils ont été manipulés, tandis que le gouvernement aura une fois de plus salement écorné son image auprès des jeunes.

Préparez-vous donc au spectacle qui arrive. Le début des hostilités n’attendra probablement même pas la publication des décrets d’application, attendue pour les prochains jours…

[MàJ] Il est important de noter une chose essentielle : le Conseil Constitutionnel n’est pas celui qu’il faut blâmer pour ce triste épilogue, même s’il est la conséquence de ses décisions. Ces dernières n’ont en effet principalement été motivées que par la forme du texte, et non le fond. Les sages n’ont, par exemple, pas dit “il faut que les pirates de musique aillent en prison” mais “les nouvelles sanctions demandées concernaient les échanges en pair-à-pair, qui ne sont pourtant pas le seul moyen d’échange à être largement utilisé, les peines doivent donc être les mêmes”. De même, ils n’ont pas prétendu que l’interopérabilité ne doit pas être assurée mais que comme le gouvernement n’avait pas défini ce qu’il désignait par ce mot, alors on ne pouvait en faire une condition de détournement des protections.

Le Conseil Constitutionnel a en réalité censuré des articles qui étaient flous, résultant de débats pseudo-démocratiques où seuls quelques trop rares élus ont exprimé des idées réellement réfléchies et en toute indépendance des éditeurs. Et s’il vous faut une preuve de l’ampleur du lobby qui a été mis en place, en voici une. Un gouvernement qui décore un porte-parole pour avoir défendu les intérêts de son entreprise privée, lesquels ne sont absolument pas de favoriser l’interopérabilité ou d’atténuer les sanctions, voilà qui laisse pantois. De là à penser que les imprécisions du texte final étaient intentionnelles en vue d’une censure des mesures dont en réalité l’UMP ne voulait pas, et que la gauche, qui a saisi le Conseil Constitutionnel, a été manipulée, il n’y a qu’un pas.

Un trombone rouge contre une maison

mardi 18 juillet 2006

En 1993, le premier épisode sur Game Boy de la série The Legend Of Zelda a inauguré* un concept qui, depuis, a été maintes fois réutilisé, que ce soient dans les opus suivants de cette même saga ou dans d’autres jeux : la chaîne de l’échange. En plus des objets que le héros peut collectionner à loisir au fur et à mesure, il est une zone de l’inventaire réservée à un objet très particulier : le “trading item”. Il n’est pas marqué comme tel, mais on comprend très vite le principe : tout comme une chaîne a son premier et son dernier maillon, la “trading sequence” commence par un premier objet, souvent trouvé anodinement et qu’on pourra échanger par la suite contre un autre objet. Lequel pourra être échangé de la même façon contre un nouveau, etc. Jusqu’à obtenir l’objet final, qui peut être soit un objet indispensable ou un gros bonus utile.

Poupée YoshiRubanC’est ainsi qu’en partant d’une simple poupée en forme de Yoshi, gagnée à un jeu d’adresse, Link la donnera à une mère de famille qui lui offrira en retour un ruban, qu’il échangera contre de la pâtée pour chien, laquelle lui permettra d’obtenir des bananes… de fil en aiguille, ce sont ensuite un bâton, du miel, un ananas, une jolie fleur, une lettre, un balai, un hameçon, un collier, une écaille de sirène qui passeront de main en main. Alors enfin, Link pourra acquérir un objet indispensable à la résolution de l’ultime énigme du jeu.

Sous un aspect de simple procédure à suivre aux yeux du joueur qui ne se pose pas trop de questions, le concept de chaîne de l’échange illustre pourtant une des profondes vérités du commerce : un objet peut avoir une certaine valeur propre (comprendre le prix auquel on peut l’évaluer), cette valeur est sans commune mesure avec celle qu’il pourrait représenter pour une personne ayant vraiment envie d’acquérir cet objet. Il suffit de procéder sans se presser, en cherchant plus à aider son prochain qu’à profiter d’un objet. C’est en quelque sorte une version imagée de ce que les économistes appellent la “chaîne de création de valeur”. Cet idéal théorique exprime que d’une matière première première on arrive à un produit fini qui donnera satisfaction à son acheteur mais aussi à tous les maillons de la chaîne de production : l’entrepreneur reçoit des bénéfices, les employés un salaire, et tout le monde est gagnant.

Trombonne rougeLe 12 juillet dernier, Kyle MacDonald, un jeune canadien de 26 ans, a achevé une chaîne de l’échange assez impressionnante : un petit trombonne rouge au départ, une maison flambant neuve à l’arrivée. Entre les deux, une année entière et treize autres objets, allant du stylo en forme de poisson à un rôle dans un film en passant par scooter des neiges, un après-midi avec le hard-rocker Alice Cooper ou un contrat d’enregistrement d’album avec une maison de disque.

“J’irais n’importe où dans le monde pour échanger un objet”, affirme l’audacieux. Et c’est exactement ce qu’il a fait, du moins sur le continent américain : à chaque fois, Kyle s’est rendu sur place pour procéder à l’échange et a publié une note dans un blog créé à l’occasion. Même si l’initiative a été rapidement reprise et gonflée par les médias, le résultat obtenu montre en tous les cas que le jeune homme a ainsi réussi à insuffler une concrétion patente au concept de chaîne de l’échange.

Avis aux amateurs : Kyle, devenu à cette occasion citoyen d’honneur de sa nouvelle ville, invite aujourd’hui ses fans à sa pendaison de crémaillère le 4 septembre prochain…

* Note : il est possible que ce jeu n’ait pas réellement été le premier à utiliser cette idée, mais à ma connaissance c’est le premier à en avoir une véritable quête dans la quête, menée tout au long de l’aventure.

Géoportail ou Google Maps ?

vendredi 7 juillet 2006

Geoportail, vous en avez forcément entendu parler dans les médias. Le site est au moins aussi célèbre pour son intérêt intrinsèque que pour le semi-échec qu’a constitué son lancement. A peine sa mise en ligne répercutée sur les ondes, les quelques serveurs rendaient l’âme sous les milliers de requêtes HTTP. Il aura dès lors fallu les efforts ininterrompus de plusieurs personnes pendant presque une semaine pour remetttre le site à flot.

Google Maps, lui, a désormais une bonne année derrière lui. Son lancement en février 2005 a été moins chaotique, en grande partie grâce au savoir-faire de Google en matière de gestion des effets d’annonce, et aussi au fait que les photos ne sont venues que par la suite, courant avril. Très logiquement, Google Maps, accompagné de son petit frère Google Earth (logiciel autonome pour Windows, Mac et Linux) est très vite devenu la coqueluche du monde entier, au fur et à mesure qu’il mettait en ligne les photos de tous les recoins du monde. En constante amélioration, le site propose depuis quelque mois des photos de qualité à peine croyable sur toutes les grandes villes, ainsi qu’un système de recherche de services de proximité.

Il ne fait aucun doute que la mise en ligne gratuite des photos de l’IGN, jusqu’à présent vendues fort cher, suit le mouvement de la cartographie grand public, inauguré par Google l’an dernier. Un peu comme pour le projet de bibliothèque numérique européenne, que le gouvernement français défend fiévreusement après avoir craché abondamment sur Google Books. Comme quoi, la concurrence reste le principal moteur de l’évolution technique, quoi qu’on puisse annoncer pour sauver la face.

Mais revenons à nos moutons : qui est le meilleur de Geoportail ou Google Maps ? Mon premier réflexe, comme la plupart des personnes je pense, a été de chercher aux différents lieux où j’ai vécu personnellement. Et par deux petits exemples, on peut distinguer les avantages et les défauts des deux sites. Commençons par le petit patelin en pleine cambrousse iséroise, situé à une bonne trentaine de kilomètres de Grenoble :

Campagne

Ah, la campagne…

Comme qui dirait, il n’y a pas photo. Ailleurs que dans les villes, Google en France n’offre que des cartes peu lisibles si on ne superpose pas les routes. Passons maintenant à mon domicile actuel, en Ile-de-France :

Ville

Coucou !

Cette fois, les rôles sont inversés : autour de Paris (mais il en est de même pour la plupart des grandes villes), Google offre un niveau de détail incomparable, et avec des couleurs beaucoup moins délavées. Si vous allez voir le château de Versailles, vous y verrez même les gens dans la cour !

Outre la qualité des clichés, il faut bien avouer que niveau utilisabilité, beaucoup de progrès restent à faire de la part de l’IGN. L’interface est moins attrayante et moins réactive que celle de Google, et plusieurs bugs gênants restent présents sur Geoportail, surtout si on n’est pas sous Explorer/Mozilla. Enfin, on sent la forte influence “politiquement correct” au niveau des endroits “sensibles” qui ont été décolorés, alors même que ces zones sont visibles chez Google…

Globalement, on ne peut pas dire que Geoportail soit mauvais, loin de là, et sa couverture quasi-totale du pays plaide en sa faveur. Et puis, le site est encore très jeune, et l’initiative de faire profiter tout un chacun d’une base d’images aériennes aussi conséquente que celle de l’IGN est évidemment une initiative louable. Une nouvelle version du site, intégrant parait-il le relief, est prévue pour la fin de l’été. En espérant que d’ici là, l’institut aura appris à dimensionner un site web…

La fille imprudente qui valait 30 millions

mardi 20 juin 2006

The Inquirer nous fait part d’une histoire comme notre société moderne, et notamment le modèle américain, tend à les multiplier. Une jeune fille de 14 ans vient de porter plainte contre les créateurs de MySpace, le site de rencontre hyper-tendance pour les djeunz américains. Adepte du service, elle aurait été agressée sexuellement par un homme rencontré sur le site et réclame 30 millions de dollars de dommages et intérêts.

Son avocat, comme principal argument, prétend que MySpace ne fait rien d’efficace pour protéger les mineurs :

“MySpace is more concerned about making money than protecting children online”

(Hmm… et lui alors ?)

Signalons tout de même que la petite fille a accepté de donner son numéro de téléphone à son agresseur (on ne sait pas si elle a porté plainte contre lui, par ailleurs) et a priori ses parents l’ont laissée le rencontrer. L’agression s’est déroulé après qu’ils soient ensemble allés au cinéma et manger un morceau. Bref, le schéma classique d’une rencontre qui tourne mal, ce qui ne dépend donc pas de la façon dont elle a été rendue possible. Ou en tout cas pas d’une façon qui serait un tant soit peu prévisible. Car pour quelques cas, très médiatisées, d’agressions via l’internet, combien à la sortie du collège/lycée ou sur le chemin d’une boîte de nuit ?

Passons rapidement sur la nécessité d’apprendre aux enfants à se méfier des inconnus et les dissuader de donner leurs coordonnées personnelles facilement. Tout le monde est d’accord là-dessus, mais rares sont les parents qui accepteront l’idée, même face à l’évidence, qu’ils ont failli dans leur rôle d’éducateur si leur gamin le fait quand même. C’est humain, comme on dit.

De plus, prétendre être à même de vérifier la majorité de celui qui utilise un ordinateur relève encore à l’heure actuelle tient du fantasme pur et simple. Et quand bien même si on y arrivait, en suivant la logique de cette plainte, MySpace devrait empêcher toute personne susceptible d’agresser un mineur d’en contacter un. Imaginons donc un peu la même jeune fille en train de discuter avec son futur agresseur sur le même site en version ainsi “sécurisée” :

– lol, bon alor tu me file ton tel ?
– ok
– … (votre saisie ne respecte pas la charte de protection de ce site, votre interlocuteur ne l’a donc pas reçue)
– alors ?
– euh attends
– … (votre saisie ne respecte pas la charte de protection de ce site, votre interlocuteur ne l’a donc pas reçue)
– ba koi ?
– sa marche pô
– ta ka m’lenvoyé par MSN… c koi ton adresse ?
– … (votre saisie ne respecte pas la charte de protection de ce site, votre interlocuteur ne l’a donc pas reçue)
– tin mé c tro pourri ce site ! jvé en en utilisé 1 otre !
– ok tu me dira lequel ?
– oui bien sur

Prometteur, non ?

Après les procès contre MacDonald’s qui fait grossir, le tabac qui donne le cancer, les voitures qui incitent à dépasser les limitations de vitesse et tant d’autres affaires du même genre, le constat est accablant : un grand nombre de personnes sont prêtes à s’affirmer ouvertement comme irresponsables, voire complètement stupides, en revendiquant une dépendance vis-à-vis des vendeurs de biens ou de service. Mais après tout, tant que ça sera aussi – potentiellement – bien rétribué…

Pssst, petite, tu sais que tu pourrais également porter plainte contre ton opérateur téléphonique et réclamer 30 millions de plus ?

OpenOffice-Mac privé de WWDC

lundi 19 juin 2006

OpenOffice, la suite bureautique en open-source a beau se porter assez bien et faire son petit bout de chemin sous Windows après avoir conquis la communauté Linux, il reste une plate-forme sur laquelle elle est très boudée : Mac OS. Eric Bachard, qui participe activement au portage d’Open Office sur le système d’Apple, annonce aujourd’hui, avec force regrets, qu’il n’a pas pu collecter l’argent nécessaire pour aller représenter son activité à la WorldWide Developer Conference 2006, le salon qu’Apple organise pour les développeurs tous les ans au mois d’août.

La nouvelle commence à faire du bruit dans la communauté Mac, et oppose globalement (en caricaturant un tantinet) deux camps : d’un côté, les supporters d’OpenOffice qui accusent les utilisateurs de Mac de préférer Microsoft au logiciel libre et, de l’autre, les détracteurs de la suite bureautique libre qui accusent celle-ci d’être entachée d’un portage indigne du Macintosh. Eric Bachard n’a pas directement accusé les utilisateurs de Macintosh d’être des conservateurs à la botte de Billou, mais sa décision a bel et bien réveillé un malaise latent entre le Mac et le logiciel libre.

Si on regarde objectivement les choses, on constate en effet qu’OpenOffice sur Mac, ce n’est vraiment pas encore la panacée. A la base un logiciel Unix/Linux, la communauté du libre assure depuis longtemps un portage de (très) bonne facture pour Windows, qui rend la suite bureautique tout à fait crédible face à son rival made-in Microsoft. On télécharge le logiciel, on l’installe comme on le fait avec n’importe quel autre programme pour Windows, et OpenOffice fonctionne avec une interface conforme à ce qu’on peut voir d’habitude sur ce système.

L’utilisateur de Mac, lui, se voit gratifié d’une étape supplémentaire indispensable avant ou après l’installation du logiciel : l’installation de l’interface X11. Si le connaisseur du monde Linux sait de quoi il s’agit, l’utilisateur de base lui ne comprend pas cette nécessité, et encore moins le fait que cette étape ne soit pas incluse. Et une fois ceci fait, la déception est souvent de mise : OpenOffice se révèle lent au chargement et à la détente, y compris sur des modèles récents de Mac. Sans parler de l’interface qui ne respecte en rien les canons préconisés par Apple en matière d’interface homme-machine. Le Mac-user, habitué à des programmes à la réactivité optimisée et à l’aspect léché, ne se sent pas satisfait.

La question qui divise est donc la suivante : les utilisateurs de Mac ne respectent-ils pas assez les efforts fournis pour porter OpenOffice sur leur plate-forme ? On pourrait certes penser à priori qu’ils sont assez ingrats de se plaindre alors que ces efforts sont réels, surtout quand on voit le peu de volontaires face au travail énorme que cette activité suppose. Mais ce serait un peu vite oublier un élément très important : l’utilisateur de Mac, par son achat, est souvent, plus ou moins consciemment, une sorte de militant. En payant, généralement un peu plus cher, pour une machine qui s’utilise différemment d’un PC sous Windows ou Linux, il signifie son intention de pouvoir bénéficier de logiciels respectant son choix. Aussi, un programme lent et “moche” le conduira très probablement au mépris.

Imaginez-vous en train d’acheter une belle Mercedes et vous rendre compte que quand vous y mettez du carburant tel qu’on en trouve partout, elle devient poussive, moche et bruyante. Eh bien c’est un peu ce qui se passe dans la tête du Mac-user face à OpenOffice-Mac : à moins qu’il attache une importance toute particulière à utiliser du logiciel libre, cette suite bureautique constituera à ses yeux une attaque directe à son choix d’achat initial. D’où réaction logique : déception et rejet.

Et il ne faut pas trop compter sur l’argument de la gratuité du logiciel. La valeur ajoutée du Mac par rapport au PC tient en effet essentiellement à son système et sa logithèque qui lui est propre, ce qui dépasse la simple question du prix. La division Mac de Microsoft l’a d’ailleurs bien compris : depuis le passage à Mac OS X de Microsoft Offce, ses concepteurs font en sorte de respecter scrupuleusement les codes graphiques du Mac tout en intégrant des fonctions propres à la plate-forme, inédites dans les versions Windows.

Preuve en est que la communauté Mac elle aussi se trompe parfois de débat… Le logiciel libre a certes des arguments indéniables, il lui faut tout de même savoir à quel public il s’adresse. Le succès du Mac étant en grande partie celui de Mac OS, il faut arriver à comprendre le quasi-contrat que l’acheteur d’un Mac passe avec Apple : accepter une part d’anti-conformisme en échange de logiciels d’un certain niveau de performance et de cohérence dans l’interface.

10 ans de web : rétrospective par Celeri

lundi 12 juin 2006

Club-Sénat, Think Tank dédié aux nouvelles technologies, vient d’ouvrir un dossier consacré aux 10 ans de l’internet en France. Il ne s’agit pas d’un anniversaire officiel, mais d’un anniversaire pragmatique. C’est en effet en 1996 que les premières offres grand public d’accès au net ont fait leur apparition en France. L’association a fait appel à 10 experts en leur demandant quelles sont selon eux les 10 principales choses que l’internet a changé pour eux.

Je ne fais pas partie desdits experts (faut pas rêver), mais je consacrerai tout de même une note au même objectif. Car oui, cela fait 10 ans que j’utilise l’internet de façon personnelle. Ma toute première connexion date de février 1996, un jour où avec mon meilleur ami je mis les pieds dans un cyber-café sis à Grenoble. A l’époque, la quantité de sites internet était négligeable comparé à celle d’aujourd’hui, mais on trouvait tout de même quelques sites créés par des amateurs (très majoritairement américains), référencés par quelques rares moteurs de recherche, le plus puissant d’entre eux à l’époque étant AltaVista, créé par la société Digital. Et Yahoo n’était qu’un portail, c’est-à-dire un site qui référençait un certain nombre d’autres sites, et non un moteur de recherche.

Ce premier pied sur la toile mondiale ne fut pourtant pas ma toute première connexion à un système informatique distant. J’avais déjà éprouvé le service télématique CompuServe (devenu depuis un simple fournisseur d’accès au net) ainsi que son extension graphiques aux avatars animés “WorldsAway”). CompuServe avait comme particularité de lier entre eux de nombreux sites thématiques mais aux rubriques normalisées : espaces de téléchargement, d’aide, de news, de forum, de tchat… pour une centaine de francs mensuels et le prix des communications locales (remboursées à 65% entre 22h et 6h), on avait ainsi accès à beaucoup de choses. Avant CompuServe, je m’étais également essayé à des serveurs dits “BBS”, basés sur des interfaces comme FirstClass ou CalvaCom (auxquels on pouvait se connecter en reliant son ordinateur à un minitel si on n’avait pas de modem… tout une époque !). Les souvenirs sont plus flous, mais je dirais que ces premières connexions datent de 1992. Et très vite, les factures de téléphone infligées à mes parents se sont avérées salées.

J’ai eu la chance de bénéficier d’un abonnement d’accès à l’internet quelques mois après ma visite au cyber-café. Via un tout jeune fournisseur d’accès nommé Alpes-Networks. Je me rappellerai longtemps de la phase d’installation, qui n’avait rien à voir avec la façon dont ça se passe aujourd’hui. Physiquement, tout le monde était éligible, puisqu’il suffisait d’avoir une ligne téléphonique. Le problème ne venait donc pas, comme avec l’ADSL, de longueur d’ouverture de ligne. La vraie difficulté était l’installation logicielle. En ces temps, mon domicile comptait (déjà !) deux micro-ordinateurs : un Macintosh (modèle 7100 de la première série “PowerPC) et un PC (Pentium 133), chacun disposant d’un modem sachant exploiter une vitesse respective de 9600 et 14400 bits par seconde. On disposait donc de débits entre 30 et 50 fois plus faibles qu’un accès ADSL de base d’aujourd’hui, mais la gêne n’était pas proportionnelle, les données à transférer étant beaucoup moins nombreuses.

Sur le Mac, installer l’accès au net était moyennement compliqué : on copiait quelques fichiers dans le dossier système, on redémarrait, on saisissait quelques champs de texte pour paramétrer le script de connexion PPP, et c’était bon. Sur PC, il fallait installer le protocole TCP/IP qui se trouvait au fin fond du CD de Windows 95, redémarrer et saisir les paramètres IP dans une fenêtre de dialogue. La gestion du script de connexion n’était pas possible (ou du moins je n’y étais pas arrivé) et donc il fallait saisir ses identifiants à chaque connexion dans une fenêtre de terminal.

Le kit de connexion livré par Alpes-Networks installait le navigateur Mosaic, le pionnier du WWW, mais la première étape une fois connecté consistait invariablement à aller télécharger Netscape Navigator, alors déjà en version 2.0. On pouvait dès lors accéder à des sites gérant des technologies très avancées comme les frames, le JavaScript ou les cookies. Je me souviens du tout premier site commercial officiel que j’ai visité (et croyez-le ou non, les “.com” étaient VRAIMENT rares), il s’agissait de www.7up.com. Ce n’était pas que je fûsse particulièrement fan de cette boisson, mais ce site s’était donné un rôle de vitrine technologique. Par la suite, c’est un des premiers à exploiter la technologie Flash, en fin 1997.

Voilà pour les quelques souvenirs qui me viennent en premier lieu quand je repense à cette période de naissance de l’internet en France. Je connais assez peu de personnes qui ont pu être témoin des mêmes choses dans mon entourage direct, ce qui rend le sujet intéressant à raconter. Une hypothétique prochaine note tentera de dresser ma rétrospective à proprement parler, à savoir ce qui m’a marqué au fil des ans.

Les 10 mots de passe les plus courants

mercredi 31 mai 2006

On ne cesse de nous le répéter, ces temps-ci : il faut savoir être imaginatif dans le choix de ses mots de passe. Trop courts, trop basiques, trop prévisibles, trop récurrents, les codes utilisés par la majeure partie des gens ne sont pas assez sécurisés, et ils peuvent être la proie de voleurs d’identité ou de videurs de comptes bancaires. Evidemment, toutes les données ne valent pas forcément la peine d’être archi-protégées, mais bon nombre d’entre nous n’en ont qu’un seul et unique, qu’ils utilisent allègrement pour la gestion de leurs fichiers à celle de leur messagerie, en passant par celle de leurs comptes en banque. Et là, ça peut vite devenir un gros danger.

Le blog “Modern Life Is Rubbish” a récemment publié les résultats d’un sondage intéressant, lequel cherchait à connaître les 10 mots de passe les plus “classiques”, parmi un millier d’échantillons environ, la plupart provenant de personnes de nationalité anglaise. Voici le résultat :

  1. 123
  2. password
  3. liverpool
  4. letmein
  5. 123456
  6. qwerty
  7. charlie
  8. monkey
  9. arsenal
  10. thomas

les “123”, “123456” et “qwerty” étaient plus que prévisibles : des enchainements de lettres ou de chiffres ; “charlie” et “thomas” sont des prénoms, donc devinables en connaissant un peu la personne ; “liverpool” et “arsenal” sont 2 des plus grands clubs de foot d’Angleterre, donc pas trop difficile à deviner si l’utilisateur en est fan. Le reste n’est pas non plus d’une robustesse avérée, vous en conviendrez. J’aime beaucoup le “letmein” en passant, qui à lui tout seul illustre le phénomène du “trop de mots de passe tue le mot de passe”.

Personnellement, j’ai arrêté de conseiller aux gens de retenir plusieurs mots de passe compliqués différents : le nombre de services où on doit s’identifier augmente en permanence, et on aboutit forcément à une situation où la personne cherche à ne garder qu’un seul mot de passe pour tout, parfois même assez facile à deviner. Ce que je conseille donc est un mot de passe unique, mais modulaire : choisissez une base assez sécurisée (avec au moins 8 caractères dont des lettres, des chiffres, et un ou deux symboles comme le trait d’union ou le point), et faites-en subtilement varier 2 ou 3 caractères en fonction du nom de service auquel on se connecte. Ce n’est pas aussi robuste qu’un mot de passe différent à chaque fois, mais ça a le mérite de ne pas avoir à en inventer un nouveau pour chaque service, et de pouvoir s’en souvenir immédiatement sans avoir à les noter quelque part. Pratique !